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Scène 1: Corésus | |
| Corésus : |
Troubles secrets dont l'horreur me dévore, Que ne me laissez-vous respirer un moment? Je suis près d'immoler un rival que j'abhorre; Sa mort, loin de calmer l'excès de mon tourment, Ne fait que l'irriter encore. Troubles secrets, dont l'horreur me dévore, Que ne me laissez-vous respirer un moment? Quoi? C'est à mon rival qu'elle devra la vie! Il sauve la princesse. Ah! Son sort est trop beau! Mon rival, en vainqueur, descend dans le tombeau. Quels regrets! J'entendrai cette amante en furie? Dieux, qu'elle va l'aimer! Qu'elle va me haïr! Elle vient, je ne puis la voir, ni la fuir. |
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| Callirhoé : |
Seigneur, de vos devoirs je n'ose vous instruire. Mais tout est prêt, mon sang à l'autel doit couler. Si votre main tremble de m'immoler, Jusqu'à mon cœur je saurai la conduire. Allons. |
| Corésus : | Ciel! Qu'osez-vous me dire? |
| Callirhoé : |
Trop de malheurs ont troublé ce séjour, Je les pardonne à votre amour extrême. Pardonnez-moi de même; Sans peine, je renonce au jour. |
| Corésus : |
Je vous punirais de mon crime! Les dieux sont moins cruels, Moins barbares que vous; Ils apaiseront leur courroux, Ils prennent une autre victime. |
| Callirhoé : |
Je le verrais périr, et périr par vos coups! Etes-vous Corésus? Que devient votre gloire? Voulez-vous faire croire Que vous ne l'immolez qu'à vos transports jaloux? |
| Corésus : |
Aux autels de nos dieux, est-ce moi qui l'entraîne? De son trépas, que pourrais-je espérer? Je sais trop que la mort où je vais le livrer Ne saurait adoucir ma peine. |
| Callirhoé : | Que veux-tu donc, cruel? T'assurer de ma haine? |
| Corésus : |
Quoi? De tous mes malheurs votre haine est le prix! Outragez, accablez un cœur qui vous adore. Hélas, vos plaintes et vos cris Devraient-ils me toucher encore? Je ne l'immole point, il demande à périr. |
| Callirhoé : |
Et moi, je demande sa vie; Mais vous voulez sa mort. |
| Corésus : |
Peut-être je l'envie, Elle assure vos jours. |
| Callirhoé : | C'est à moi de mourir. |
| Callirhoé / Corésus : |
Non, non, ne résistez pas, Quand le ciel le commande, Rendez-vous, rendez-vous, c'est mon/son sang, C'est mon/son sang qu'il faut que l'on répande. Non, ne résistez pas, rendez-vous, C'est mon/son sang qu'il faut que l'on répande. |
| Corésus : |
Que le tonnerre gronde et tombe en mille éclats, Que le carnage recommence, Que le ciel allumé redouble sa vengeance, Que l'effroi, que la mort volent dans ces climats; Rien n'égale l'horreur de voir votre trépas. |
| Callirhoé : |
Eh! Le verrez-vous moins? Croyez-vous que je vive? S'il périt, doutez-vous que mon ombre le suive? Tremblez! Tremblez! Du même fer je me frappe, je meurs. Et la mort, malgré vous, réunira nos cœurs. |
| Corésus : |
Quelle fureur! Ô ciel! Que deviens-je moi-même? N'est-il point d'autre sang pour apaiser les dieux? |
| Callirhoé : |
Les dieux ont prononcé. Conservez ce que j'aime. On l'amène en ces lieux, Hâtez-vous, frappez moi, Je l'attends, je le veux. |
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| Callirhoé : | Ah! Prince, où venez-vous? |
| Agénor : |
Où mon amour me guide. Ministre des autels, Faites votre devoir. |
| Callirhoé : |
N'écoutez point son désespoir. Que je meure; c'est moi pour qui le sort décide. |
| Corésus : |
Quel spectacle pour moi! Quel amour! Quel transport! |
| Callirhoé / Agénor : |
Mes jours sont trop payés Si ma mort vous délivre. |
| Callirhoé : |
Hélas, hélas, pourrais-je vous survivre? Qu'espérez-vous de votre mort? |
| Callirhoé / Agénor : |
Hélas, hélas, pourrais-je vous survivre? Qu'espérez-vous de votre mort? Ton amour outragé demande mon supplice. C'est moi, c'est moi qu'il faut que l'on punisse. |
| Corésus : | Ciel! En les immolant, je ne puis les punir. |
| Callirhoé / Agénor : |
Frappe! Voilà mon cœur. Frappe! Voilà mon cœur. Qui peut te retenir? |
| Agénor : | Frappe! |
| Corésus : |
Agénor, j'applaudis à l'ardeur qui t'anime. J'honore ta vertu, tes vœux seront contents. |
| Callirhoé : | Je frémis! Achève, il est temps. |
| Corésus : | Arrêtez! C'est à moi de choisir la victime. |
| Callirhoé : | Vous mourrez. |
| Corésus : |
Je sauve vos jours de vos malheurs, Des miens je termine le cours. Vous pleurez? Se peut-il que ce cœur s'attendrisse? Je meurs content, mes feux ne vous troubleront plus. Approchez! En mourant, que ma main vous unisse. Souvenez-vous de Corésus. |
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